Journées Traction Électrique Ferroviaire

Ces journées scientifiques réunissent une quarantaine de participants : industriels, chercheurs, doctorants, étudiants, ainsi que quelques anciens actifs du domaine ferroviaire. Elles sont organisées par la SEE[1], le Laboratoire LAPLACE[2] et Club de la Grande Vitesse Ferroviaire (CGVF). Elles se déroulent en deux parties : une journée consacrée aux exposés et une journée dédiée à la visite technique de la plateforme Oc’Via Maintenance et des installations du CGVF.

Les conférences se déroulent dans le grand auditorium du Musée de la Romanité.

 

[1]  SEE : Société de l’électricité, de l’électronique et des technologies de l’information et de la communication.

[2] Le laboratoire plasma et conversion d’énergie situé à Toulouse est l’un des grands laboratoires de recherche du Centre national de la recherche scientifique français.

Ouverture de la cession par M Jean Luc Gibelin

Les journées sont lancées par le propos introductif de M Jean-Luc Gibelin, Vice-Président de la Région Occitanie chargé « Mobilités pour tous et infrastructures de transports ». Il s’appuie en particulier sur l’offre mensuelle du TER à 1 € proposée par la région pour exprimer un besoin urgent de matériels. Il regrette certains obstacles réglementaires au déploiement de solutions nouvelles de mobilités.

Par la suite, tout au long des exposés de la journée, il sera mis en évidence que les développements innovants se font à une échelle de temps qui ne répond pas nécessairement à l’exigence exprimée par le vice-président de la région sans négliger que des développements innovants peuvent amener des phénomènes nouveaux qui demandent de créer de nouvelles règles pour s’en prémunir…

Intervention de Philippe Ladoux (UPS-Laplace)

Thème : L’électronique de puissance, vecteur d’optimisation pour l’alimentation des infrastructures de traction électrique.

Dans cette intervention, Philippe Ladoux montre comment l’évolution de l’électronique de puissance appliquée tant au réseau continu qu’au réseau monophasé permet d’en optimiser les caractéristiques au bénéfice de la performance et de la robustesse de l’exploitation ferroviaire. Par exemple, le stockage stationnaire sur le réseau continu peut constituer une solution palliative à l’implantation coûteuse de nouvelles sous-stations afin de maintenir le niveau de tension indispensable à l’utilisation des performances optimales des matériels.

Intervention de Sara Villagra (SNCF-Réseau)

Thème : Supraconductivité, les systèmes industriels pour le ferroviaire.

Après un rappel rapide sur les propriétés des matériaux supraconducteurs, Sara Villagra présente deux applications possibles de la supraconductivité dans le domaine ferroviaire au bénéfice de la robustesse de l’exploitation (limiteur de tension de Bussurel) ou du renforcement du plan de tension (faisceau de Vouillé) ; dans les deux situations, une forte maîtrise industrielle est indispensable. Dans le cas du faisceau de Vouillé le recours à des câbles supraconducteurs apporte une solution d’alimentation qu’une solution traditionnelle ne permettait pas dans la zone géographique urbaine contrainte de Paris-Montparnasse ; tout recours à l’utilisation de cette technologie mérite un bilan tant économique qu’énergétique avant une prise de décision.

Intervention de Michel Piton (Alstom)

Thème : Introduction des modules MOSFET SiC dans les chaînes de traction ferroviaire : récentes réalisations et perspectives

Michel Piton présente succinctement les différences essentielles entre les IGBT silicium et les MOSFET carbure de silicium selon leur niveau de tension. Il précise que les IGBT silicium ne seront pas nécessairement effacés par les MOSFET carbure de silicium ; ces derniers nécessitent des dispositions spécifiques d’assemblage pour contrôler l’inductance de boucle afin de minimiser les surtensions au blocage. Les intérêts de l’utilisation des MOSFET carbure de silicium résident dans la possibilité d’accroître les densités de courant ou d’optimiser leur refroidissement. Des essais faits par ALSTOM sur le métro de Stockholm ou dans le cadre de Shift2Rail (projets PINTA avec la SNCF) montrent des gains importants sur l’efficacité énergétique, au moins 10 %. Malgré une fiabilité élevée, une limite dans le déploiement actuel du MOSFET carbure de silicium réside probablement dans le prix élevé des composants, favorisé par une production essentiellement asiatique.

Intervention de Bogdan Vulturescu (SNCF)

Thème : La révolution du stockage de l’énergie électrique dans les trains : le projet TER à batteries.

Bogdan Vulturescu montre d’abord la diversité des technologies des batteries au Lithium et leur évolution dans le temps. Il appuie sa présentation sur de nombreux exemples ferroviaires japonais explorés dès le début du 21ème siècle. Il insiste ensuite sur les exemples français comme le Régiolis hybride ou l’AGC à batteries en montrant quels types d’exploitation permettraient l’utilisation de tels trains sur des zones dépourvues de caténaires. Des aspects importants restent à explorer sur l’accroissement des capacités énergétiques de tels trains et sur la charge rapide des batteries en particulier sous alimentation continue. La participation de la SNCF au projet européen Rail4Earth permet aussi de consolider d’autres approches avec de nombreux partenaires européens (industriels et opérateurs).

 

Le « triptyque » : Matériel, Infrastructure, Exploitation est fondamental pour réussir et optimiser le service rendu par les trains hybrides ou à batteries en prévoyant les installations au sol pertinentes et des parcours ou roulements des engins avec des temps d’arrêt adaptés.

Intervention de Didier Frugier (CIM-SNCF)

Thème : Compatibilité électrique Infrastructure et Matériel Roulant.

Didier Frugier montre l’impact sur le système ferroviaire de l’introduction de nouveaux matériels pourvu de chaînes de traction modernes ; les stratégies de pilotage des convertisseurs d’entrée des trains associées aux impédances des systèmes d’alimentation peuvent provoquer des instabilités majeures du système allant jusqu’à l’impossibilité d’exploiter les trains sur certaines zones ; ce type d’événement était difficilement anticipable, il dépend du nombre d’engins dans la zone alimentée et de leur puissance nominale. Des approches de modélisation par « boîtes noires » sont développées pour mieux anticiper et traiter les dysfonctionnements qui peuvent se résoudre par des actions tant au sol qu’à bord le tout à valider par des essais complémentaires sur site. Parallèlement il convient aussi d’harmoniser les règles d’homologation dans l’arsenal européen (EN50388-2).

Intervention de Fabrice Hickenbick (SNCF TGV M)

Thème : Maintenance Prédictive : Le Télédiagnostic au Cœur du TGV M

Fabrice Hickenbick décrit des éléments essentiels de la stratégie de maintenance du TGV M, fondée sur le télédiagnostic avec l’observation d’environ 25000 variables toutes les 100 ms. Ces données, propriété de la SNCF, sont transmises au sol et partagées entre la SNCF et ALSTOM pendant la garantie des rames. L’analyse statistique « big data » des données doit permettre de définir des équations adaptées pour déclencher une maintenance au juste besoin et consolider la démarche de maintenance prédictive.

Intervention de David Goérès (SNCF TGV M)

Thème : TGVM : l'ambition écologique de la Grande Vitesse

Après un rappel général comparatif sur divers modes de transport et sur le développement plutôt restreint de la grande vitesse ferroviaire, David Goérès présente quelques aspects majeurs du TGV M, en particulier son efficacité énergétique accrue de 20 % qui repose pour près de 66 % sur l’aérodynamique du train ; d’autres aspects comme le nouveau pilotage du freinage permettant une meilleure utilisation de la récupération d’énergie ou le pilotage des auxiliaires de traction contribuent au 33 % restant. Sur un parcours de référence le TGV M améliore de 24 % la consommation d’énergie d’un Euroduplex, encore plus si la valeur est ramenée au voyageur (le TGV M est plus capacitaire…). Sur l’aspect environnemental l’utilisation accrue de matériaux recyclés en production initiale et la recyclabilité finale sont un point fort du TGV M.

Intervention de Mikaël Seznec (SCLE-SFE)

Thème : ERTMS et ETCS, le ferroviaire prépare demain.

Image actualisée du déploiement ERTMS à l’horizon de l’obsolescence du GSM-R (2G) et l’arrivée de FRMCS (5G). La présentation permet de montrer les différents niveaux d’ETCS (1, 2, 3) d’évoquer les « Eurobalises »mises en œuvre, d’ouvrir sur l’ATO[1]. Il demeure que le déploiement n’est pas aussi rapide qu’imaginé initialement. Les obstacles techniques et sécuritaires sont encore nombreux.

[1] ERTMS/ATO est le système européen et interopérable de conduite automatique des trains, reposant sur la signalisation ERTMS/ETCS

Intervention de Gérard Coquery (Université Gustave Eiffel / IFSTTAR)

Thème : Les transports à sustentation magnétique (MAGLEV) et moteurs linéaires-Etat de l'art et prospective

Gérard Coquery présente un rappel global des moteurs linéaires synchrones et asynchrones en s’appuyant sur des résultats d’essais de laboratoire de démonstrations en ligne sans négliger de rappeler quelques points bloquants ou des projets futuristes récents plus incertains (Hyperloop !). Il montre l’avance des asiatiques dans l’utilisation de la sustentation magnétique au « quotidien » ; le déploiement de ce mode de transport nécessite cependant la création d’infrastructures nouvelles parallèles à celles existant.

Le moteur linéaire asynchrone a un véritable intérêt pour l’urbain où les arrêts doivent être maîtrisés et précis indépendants de l’adhérence disponible. Il cite également l’application de la « crémaillère électrique » pour gravir (ou descendre) localement de fortes rampes.

Visite de la plateforme d’Oc’Via Maintenance et des installations du CGVF

Le mercredi 09 octobre une trentaine de participants ont été transportés par un car Lio mis à disposition par la Région, vers Générac sur la plateforme Oc’Via Maintenance située sur le « Contournement Nîmes Montpellier » (CNM).

Le groupe a été reçu par Nicolas Darbo le directeur du site.

La visite des installations a permis de sensibiliser tous les participants aux exigences de la maintenance d’une ligne nouvelle de 60 km environ sur laquelle circulent à la fois des TGV à 220 km/h et des trains de fret jusqu’à20 km/h. Cette maintenance concerne essentiellement la voie, les installations de signalisation, la caténaire et la surveillance des abords.


La visite s’est poursuivie par la découverte des installations du CGVF sur une aire de quelques centaines de mètre carré mise à disposition par les responsables d’Oc’Via. Ainsi chacun a pu admirer les maquettes offertes par CAF du futur train Intercités baptisé « Oxygène ». Ces installations abritent également quelques pièces détachées données par EIL qui serviront à transmettre nos expériences. Il s’agit en particulier du bloc commun d’une motrice Eurostar (TMST), de bogies (moteur et porteur), d’un moteur de traction et de son réducteur, etc.

C’est ainsi que se terminent ces journées de partage riches en informations techniques. Et bien sûr vous aurez tous remarqué que chacun des participants dispose d’un gilet « orange » sur lequel est inscrit le logo du CGVF.

Merci à Tous

La SEE Occitanie, le LAPLACE et le CGVF.

 

Rédacteurs : Pascal Mannevy et Alain Jeunesse

Photos : le CGVF